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09/01/2015

« Il n’existe pas de différence importante entre un modéré et un extrémiste »

 

 

 

 

 

La citation est issue d’une tribune publiée par Le Salon Beige, récemment livrée par Courrier International qui l’a reprenait du journal Al Hayat, basé à Londres…

 

 

L’auteur, Yassin al-Haj Saleh, est un Syrien originaire de la ville de Raqqa, aujourd’hui aux mains de l’Etat Islamique, grand opposant au gouvernement Syrien, très favorable aux premières heures de la révolution syrienne et grand adepte du communisme. Aujourd’hui recherché par le gouvernement autant que par les islamistes il se terre quelque part en Syrie… Malgré ce profil assez atypique sur ce site, l’homme livre une réflexion intéressante à propos de la distinction effectuée (presque) uniquement en Occident entre « musulmans modérés » et « islamistes ».

 

 

Bien loin du discours en vogue chez nos « élites » qui ne cessent de se prendre pour des exégètes de l’islam sans que personne ne leur demande, le texte est très clair : si la condamnation intellectuelle de l’Etat Islamique est très faible par les musulmans c’est qu’elle est très difficile à faire pour eux. Et ce pour plusieurs raisons.

 

 

 

 

Voici le texte, qui au delà d’une analyse politique de l’islam est une tribune expliquant l’incompatibilité évidente entre l’Islam et notre civilisation européenne…

 

 

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Il y a des islamistes qui s’opposent à Daech [l’Etat islamique]. Il y a même des islamistes, y compris salafistes, qui ont engagé le combat armé contre lui. Mais sur le front des idées ce combat reste étonnamment atone.

 


Cela amène à se demander pourquoi les musulmans ne s’insurgent pas pour défendre leur religion, cette religion qui sert aujourd’hui à désigner des pratiques qui sont les plus criminelles de l’histoire de l’humanité. Pourquoi sont-ils incapables de dire clairement que ce n’est pas l’islam ?

 

 

 

L’explication réside dans le fait qu’au niveau intellectuel il n’existe pas de différence importante entre un modéré et un extrémiste. Tous aspirent à établir durablement le règne de l’islam, dans des pays qu’ils ne voient que sous l’angle de leur [seule] identité islamique.

 

 

Le sens d’un tel règne de l’islam consiste en quelque sorte à rétablir un ordre qui aurait été dévoyé par les complots des colonisateurs et consorts. Les Etats-nations et toute notre histoire contemporaine sont considérés comme des phénomènes passagers, puisque notre vraie nature profonde résiderait dans une invariable islamique qui remonte [à la naissance de l’islam].

(…) Sur tous ces points, il n’y a pas de distinction réelle entre modérés et extrémistes. Il y a seulement ceux qui sont extrémistes (Frères musulmans), d’autres qui sont très extrémistes (les salafistes du Front islamique), d’autres qui sont encore plus extrémistes (Front Al-Nosra), et finalement ceux qui sont excessivement extrémistes (Daech). Il y a certes des islamistes qui sont modérés, mais ils sont dépourvus des bases intellectuelles qui leur permettraient d’affirmer la légitimité de leurs positions.

 

 

Pour être précis, les islamistes partagent quatre idées :

 

 

1) Le refus de séparer clairement la religion de la violence et de dire que la violence au nom de l’islam est illégitime. Par conséquent, personne parmi eux n’accepte entièrement la liberté religieuse, la liberté de changer de religion ou de ne pas en avoir. Sur ce point, il n’y a pas de rupture entre les “modérés” et Daech.

 


Les “modérés” sont incohérents quand ils s’opposent à la violence débridée de Daech sans s’opposer à la substantialité du lien entre la religion et la violence, ni à “l’application de la charia”, ni au projet de contrôler à la fois l’Etat et la société, à l’instar des organisations totalitaires.

 

 

2) L’imaginaire de l’empire. Cet imaginaire tourne autour de conquêtes, d’invasions et de gloire militaire. C’est un imaginaire de puissance et de domination, de héros et de sultans qui laisse peu de place aux aspects de la vie quotidienne, aux gens ordinaires et aux femmes. On n’a jamais procédé à une révision de l’Histoire pour dire que ces conquêtes islamiques s’expliquent par des contingences historiques, sans lien intrinsèque avec la religion.

 

 

3) Le mépris de l’Etat-nation. Ce qui compte aux yeux de tous les islamistes est la nation islamique [umma]. Les islamistes dissolvent les Etats existants dans l’umma, alors que ces Etats représentent l’intérêt général depuis plus d’un siècle et que l’umma a duré moins longtemps qu’eux. Est-ce que les islamistes “modérés” – les Frères musulmans syriens, par exemple – ont critiqué cet apatriotisme ? Pas un mot ! Pourquoi ? Parce qu’ils le partagent.

 

 

4) L’“application de la charia” est un autre point commun, qui s’ajoute à la coercition, à l’imaginaire de l’empire et au mépris pour l’Etat-nation. En l’absence de bases intellectuelles solides pour s’opposer aux extrémistes, les jeunes musulmans ont l’impression que c’est Daech et consorts qui représentent leur religion, et non pas les modérés inconsistants.

 

 

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